Auguste O’Neill (1829-1900)

La naissance d’un patriarche


Le contre-amiral Auguste O'Neill, 1891 - Remerciements à Jacques Loyer

Né à Rennes le 21 septembre 1829, Auguste, Pierre, Marie, Joseph O’Neill est le cadet d’une famille de 6 enfants fixée en Bretagne depuis 50 ans. Il grandit au sein d’une culture familiale qui place au pinacle des valeurs la foi en Dieu, le dévouement au service de la patrie et la mémoire de ses vaillants ancêtres venus d’Irlande.

Son père, Eugène O-Neill*, est dans les affaires. Il n’a pas suivi l’exemple de tant de ses aïeux et familiers dans le service des armes ou même dans la médecine comme son propre père ou son lointain cousin Claude-Alexis Ô-Neill*. Cela n’empêchera nullement Auguste, pour qui la valeur militaire est l’expression ultime de la valeur morale, de reprendre le flambeau.

Diplômé de l’Ecole Navale, il est nommé aspirant le 1er août 1847. Sa carrière commence par un naufrage : celui de la corvette La Boussole (à ne pas confondre avec la frégate qui participa à l’expédition de La Pérouse, sous Louis XVI), qui s’écrase contre un récif, le Petit-Curaçao, et se perd dans la mer des Antilles le 3 mars 1848. Les naufragés sont récupérés par L’Embuscade. Pendant 10 ans, Auguste va sillonner l’Atlantique (Antilles, Afrique de l’Ouest…), puis le Pacifique, sur des vaisseaux comme La Caravane, Le Hussard, La Constitution, Le Méléagre, L’Ardent, sans remettre un pied en France. Enseigne de vaisseau le 2 avril 1851, il est fait lieutenant de vaisseau le 27 novembre 1859. C’est alors que débute l’expédition majeure de sa carrière : celle de Chine.

Les flottes franco-britanniques quittent l’Europe en direction de la Chine, après plusieurs années de conflits larvés et l’assassinat de nombreux missionnaires et ressortissants européens sur le sol chinois. La France et l’Angleterre envoient un ultimatum à l’empereur de Chine le 8 mars 1860 dans lequel elles demandent une lettre d’excuses pour l’attaque de vaisseaux français à Peï-ho, la garantie que les Français envoyés sur place pourront passer sans peine à Tientsin (Tianjin) et Pékin, l’assurance que le gouvernement chinois est prêt à ratifier le traité de Tientsin de 1858 et, enfin, une indemnité pour couvrir les coûts de l’expédition. Le gouvernement chinois refuse et, le 8 avril, après le délai de réflexion de 30 jours accordé aux Chinois, la France et l’Angleterre déclarent la guerre.

Auguste O’Neill embarque sur La Garonne, puis sur La Gironde, et participe à la prise de Peï-ho et au débarquement des troupes françaises le 16 septembre 1860. Descendu en Cochinchine avec Le Duperré, il coopère aux prises de Saïgon, de Mytho et de Bienhoa. Médaillé de Chine, il se distingue particulièrement lors de l’expédition contre Vinh-Long, où il commande la canonnière n°18, et reçoit en récompense la croix de Chevalier de la Légion d’Honneur (31 décembre 1862). Distingué de nouveau lors de l’expédition de Go-Cong, il reste encore quelques mois en Chine avant de retourner à Brest en avril 1864.

Il se marie en cette ville le 27 juin 1865, à près de 36 ans, avec Gabrielle, fille du baron Noury, d’une famille de militaires bretons distingués sous l’Empire et la Restauration. Comme l’évoque une mention au verso du portrait de Gabrielle Noury figurant au bas de cette page, lorsque le lieutenant de vaisseau Auguste O’Neill était professeur à l’Ecole Navale au moment de son mariage, l’école était alors commandée par le capitaine de vaisseau baron Charles Noury son beau-père. De cette union naquirent 6 enfants : Henri (1866) -futur général de brigade, Anne-Marie (1868), Charlotte (1870), Charles (1872), Jean (1875) et Paul (1878), dont nous descendons tous.

Nommé capitaine de frégate le 12 mars 1870, quand éclate la guerre avec la Prusse, il s’embarque sur le cuirassé La Jeanne d’Arc en qualité de second et participe à l’expédition de la Baltique. C’est alors qu’il écrit cette lettre d’adieu pleine de tendresse à Gabrielle (voir la galerie photo ci-dessous) pour le cas où il ne reviendrait pas, lui livrant ses consignes de gestion du ménage et l’enjoignant de payer les dettes de son frère Constant avec les sommes mises à sa disposition.

A la conclusion de la paix, Auguste est fait Officier de la Légion d’Honneur (23 octobre 1871). Dès lors, il s’occupe de diverses opérations depuis Cherbourg, notamment la supervision d’un convoi de forçats vers l’Océanie. Capitaine de vaisseau le 8 octobre 1878, il siège au Conseil d’amirauté et est fait Commandeur de la Légion d’Honneur. Il est nommé contre-amiral le 2 août 1886 et prend en charge la Direction des torpilles.

Auguste O’Neill meurt à Brest le 6 juillet 1900. Son legs pour notre famille est immense : au-delà d’être notre ancêtre commun, il est aussi pour nous ce « patriarche » auquel nous nous référons tous. Son sens du devoir moral, de la famille, du service de la France, est à l’origine d’une descendance qui s’est reconnue dans ces valeurs et partage encore aujourd’hui le sentiment, des générations après, de n’être qu’une seule et même famille.

* Notez l’évolution de la graphie du nom O’Neill dans l’histoire de notre famille en France qui, d’une francisation « à l’oreille » (la particule de étant prise pour l’équivalent de la particule gaélique Ó qui signifie « descendant de »), tente peu à peu de se rapprocher de la phonétique gaélique avant de se fixer sur la graphie à l’anglaise, prédominante au XIXe siècle :  de Nel, de Naisle, Denel, d’Onel, Onel, Ôneill (XVIIe et XVIIIe siècles), puis O-Neill et enfin O’Neill au XIXe siècle.

Voir: Lettre d’adieu adressée par Auguste O’Neill à sa femme à la déclaration de guerre entre la France et l’Allemagne (1870)

Voir aussi: biographie sur le site des traditions de l’école navale.